Égrainer son CV prend un certain temps. Et l’interviewer un temps certain. Sérieux client de l’ARKEA ULTIM CHALLENGE – Brest, Thomas Coville est aussi un très bon client devant les micros. Passionné et passionnant, le skipper de Sodebo Ultim 3 n’est jamais rassasié et vous embarque facilement. Il s’attaquera le 7 janvier, à 55 ans, à son neuvième Tour du Monde…
Il a tout vu, tout fait Thomas Coville. Mini, Figaro, Vendée Globe, Trimarans ORMA, Volvo Ocean Race, Trophée Jules Verne ou Saint-Exupéry, et même la Coupe de l’America par laquelle il a commencé sa carrière en 1994, après avoir touché du Tour de France à la voile ! Au départ de l’ARKEA ULTIM CHALLENGE – Brest, il sera d’ailleurs le seul des six concurrents à savoir vraiment ce que représente un Tour du monde en solitaire en multicoque. Le seul dans l’histoire aux côtés d’Ellen Mac Arthur, François Gabart et Francis Joyon à l’avoir réussi sans s’arrêter sur sa route. Un exploit qu’il compare à un saut à ski : « Le départ dans le bruit de la cahute ressemble aux adieux des pontons. La descente du tremplin c’est l’Atlantique et le grand saut, l’apesanteur du Sud, la fragilité, jusqu’à retomber après le cap Horn et ralentir dans la remontée… ». Thomas Coville a accompli cet exploit à trois reprises déjà, s’adjugeant au bout de la cinquième tentative le meilleur chrono à la barre de Sodebo Ultim qui tiendra de Noël 2016 à décembre 2017. Il bat alors de plus de huit jours le record de Francis Joyon, avant de se faire ravir un an plus tard ce Trophée Saint-Exupéry par François Gabart qui rabote encore le temps d’une semaine, à la barre d’un trimaran nouvelle génération…
Peu importe les vacheries de l’histoire, le doyen des concurrents de l’ARKEA ULTIM CHALLENGE – Brest navigue sans relâche à l’assaut de ce Graal, lui qui considère « que la Nature nous offre la chance d’un Tour du monde par an ». C’est une question de tempérament pour ce stakhanoviste de la voile et de l’effort, repéré dès ses débuts pour ses aptitudes physiques et son engagement sans faille.
Infatigable en solitaire, précieux en équipage.
Car on ne construit pas un CV comme celui de Thomas sans quelques rencontres décisives : la première est assurément Laurent Bourgnon dans les années 90 sur le trimaran ORMA Primagaz qui lui fait découvrir la glisse et l’ivresse de la vitesse en multicoque. Il aurait rêvé faire partie de la dream team de Bruno Peyron sur Commodore Explorer en 1993, et c’est Bourgnon qui le signale quatre ans plus tard à Olivier de Kersauson avec qui il embarquera pour le Trophée Jules Verne de Sport Elec bouclé en 71 jours. Suit la Mini Transat puis l’IMOCA en 1998 avec sa victoire dans la Route du Rhum à l’issue de laquelle il rencontre Sodebo, son fidèle partenaire depuis 25 ans.
Après les années ORMA de 2001 à 2006 où il dit « en avoir bavé mais plus appris que pendant ses tours du monde », il se lance dans la chasse au Trophée Saint-Exupéry sur lequel il butte pendant cinq ans. Franck Cammas lui tend alors la main et Thomas se révèle un élément précieux du dispositif Groupama, aussi bien à la conquête du Trophée Jules Verne en 2010 que dans la victoire dans la Volvo Ocean Race l’année suivante.
Deux Cap Horn de plus qui ne sont qu’une pause dans les projets personnels de Thomas avec Sodebo. Il rebondit en 2013 en donnant naissance coup sur coup à Sodebo Ultim, un 110 pieds construit sur la base complètement revue de Geronimo sur lequel il remporte enfin le « Saint Ex » (2016) et la Transat Jacques Vabre (2017), avant de recevoir le feu vert pour un nouvel ULTIM en 2018. Le voici donc à la barre du quatrième trimaran de l’aventure Sodebo. Il en confie l’architecture à Renaud Banuls et au bureau d’études de son Team, innove avec une cellule de vie avancée devant le mât mais reste prudent sur les appendices pour la version initiale en vue d’un premier tour du monde. Passionné de technique et infatigable compétiteur, il n’a de cesse depuis de remettre sur le métier en upgradant son trimaran pour tenter de le hisser au standard des meilleurs trimarans volants de la classe ULTIM.
Un peu plus sans doute que ses cinq concurrents, Thomas Coville a rendez-vous avec l’Histoire le 7 janvier car c’est aussi son histoire à lui, à la barre de Sodebo Ultim 3.