En franchissant la ligne d’arrivée de l’ARKEA ULTIM CHALLENGE – Brest ce mardi matin à 8 h 37, le skipper du Maxi Edmond de Rothschild s’est affirmé encore un peu plus comme un grand de son sport. Auteur d’un contre-la-montre de haute volée, il a su faire preuve de sang-froid, de maîtrise et de gestion pour assurer sa victoire. Retour sur une journée riche en émotions marquée par une entrée magistrale dans le goulet de Brest, une communion avec la foule et, déjà, une certaine idée de son avenir.
L’ARRIVÉE. Lever de soleil et effusions de joie.
Instant suspendu en début de matinée au large de Brest. Le Maxi Edmond de Rothschild s’offre une arrivée en plein lever de soleil. Charles Caudrelier est reposé, encore vigilant puis hilare quand il demande au président du comité de course de confirmer qu’il a bien franchi la ligne d’arrivée de l’ARKEA ULTIM CHALLENGE – Brest. C’est le cas à 8 h 37 min après 50 jours et 19 heures à travers les océans. Le skipper peut lever les bras, retrouver les siens et profiter. Deux heures plus tard, un public nombreux s’est massé tout autour du quai Malbert. C’est le temps des premières confidences. Plus que de la course, il est question de son parcours, de ses succès – Solitaire du Figaro, Volvo Ocean Race, Route du Rhum – Destination Guadeloupe – de sa frustration de ne pas avoir pu participer au Vendée Globe, de sa reconnaissance envers Gitana pour lui avoir proposé de les rejoindre en 2019. Il évoque ce travail quotidien et surtout celui du team. « Je ne sais pas concevoir, dessiner, construire, fiabiliser un bateau, je leur dois tout », dit-il en félicitant tous ceux qui l’ont accompagné. Ensuite, Charles a mis pied à terre, soulevé le trophée avant de s’offrir un bain de foule et débuter une longue journée de sollicitations.
SA COURSE. Leçon de gestion et de résistance.
“Le bateau m’a ramené et ne m’a jamais lâché », a répété Charles Caudrelier plusieurs fois depuis son arrivée. Certes, il n’a pas été épargné à l’image de ces dégâts apparents sur le bras avant. Et puis il y a eu un système d’enrouleur cassé, un problème de dessalinisateur, de foil, un plan porteur perdu dans le Pacifique… « C’était à moi de ménager mon bateau » explique Charles. Sa course ? Un départ de haute volée, un mano a mano dans l’Atlantique Sud avec Tom Laperche, un cavalier seul dans l’océan Indien (dont il s’offrira le record), une poignée de jours avant de franchir le cap Horn, un Atlantique Sud harassant et une escale aux Açores avant de terminer l’aventure. « J’avais embarqué 47 jours de nourriture. J’aurais pu aller plus vite en forçant un peu le destin mais ce n’était pas le but. C’est une course, pas un record et le job a été fait !”
Sa course en chiffres.
Heure d’arrivée : 08 h 37 min 42 sec
Temps de course : 50 jours 19 heures 37 min 42 sec
Milles parcourus : 28 939.03 milles
Vitesse moyenne réelle : 23,74 nœuds
Vitesse moyenne sur l’orthodromie : 19,93 nœuds
SES MOTS : “Une chance inouïe et une perspective géniale”
“C’est sûr que lorsque je vois les lignes de mon palmarès, elles sont belles. Je me vois encore sur mon premier Figaro mais là, je ne peux plus faire l’adolescent. Tom Laperche m’appelle le vieux, je crois que j’ai changé de catégorie ! Dans ma carrière, ça s’est toujours bien enchaîné. Il y a eu du travail, j’espère un peu de talent, mais aussi beaucoup de chance d’avoir été au bon endroit au bon moment. À l’avenir, je pense qu’on peut encore faire des bateaux encore plus costauds. Même quand j’étais à fond, j’étais à 80%, 85% des polaires du bateau. Au début, j’étais très inquiet de perdre en performance. Il y a plein de détails qu’on peut optimiser, notamment sur les foils. Là, j’ai promis à mes enfants de calmer un peu le jeu. Mais je fais partie d’une équipe qui a de beaux objectifs. J’ai vécu par procuration la construction de Safran, de Groupama 4, de Gitana 17… On va lancer la construction de Gitana 18, ça m’éclate de développer un nouveau bateau. C’est une chance inouïe et c’est une perspective géniale. On va essayer de défendre mon titre à la prochaine Route du Rhum – Destination Guadeloupe !”
CE QU’ILS EN DISENT. Un “grand monsieur”, une “gestion de main de maître”
Les réactions se sont multipliées, tout au long de la journée, pour féliciter Charles Caudrelier. Présente sur les pontons, la Ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castera évoque « un challenge humain hors-norme » et « une formidable illustration du savoir-faire technologique et organisationnel français ». « C’est une consécration totale », savoure Ariane de Rothschild, fondatrice et armatrice du Gitana Team qui salue « un tour du monde remporté de façon exceptionnelle ». Il s’agit d’une « belle victoire, le succès d’une équipe pionnière, d’un bateau éprouvé, d’un marin solide, d’un armateur présent depuis des décennies », commente Patricia Brochard, présidente de la classe Ultim.
Les concurrents de Charles sur l’ARKEA ULTIM CHALLENGE – Brest ne sont pas en reste. Présent à Brest, Tom Laperche (SVR-Lazartigue) se dit “impressionné par la gestion globale de Gitana depuis plus de six ans”. Thomas Coville (Sodebo Ultim 3) parle de “maturité technique, de gestion de main de maître et de grand marin”, Armel Le Cléac’h (Maxi Banque Populaire XI) l’encourage à “profiter de l’arrivée” quand Anthony Marchand (Actual Ultim 3) le qualifie de “grand monsieur”. Éric Péron (ULTIM ADAGIO) conclut : “Toute l’équipe Gitana a fait un super boulot, c’est vraiment mérité !”